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Quatre jours de dolce vita à Luang Prabang

🗺️ J'y étais en mai 2023 🐸
17 octobre 2025 par
Lucie
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Nichée au nord du Laos, traversée par le Mékong et la rivière Nam Khan, Luang Prabang m’est apparue dès mon arrivée comme une ville mêlant exotisme, imprévus et beauté intrinsèque. Après deux jours de navigation sur un slow boat, il me tarde de profiter de ma première escale dans cette ancienne capitale royale, dans laquelle je séjournerai quatre jours au total.

Ce séjour s’inscrit dans le cadre d’un congé sabbatique sans programme défini… notamment la rupture amoureuse survenue peu après le début de l’aventure. Je décide de visiter le Laos dix jours avant d’y mettre les pieds et consacre régulièrement une demi-journée à l’organisation des jours à venir. Les étapes du voyage ne sont pas toujours optimisées... Ainsi, ma première matinée à Luang Prabang est dédiée à de la rédaction, avant de partir retrouver K., une voyageuse rencontrée lors du trajet en bateau depuis Houayxay.


Le vrai voyageur, c'est celui qui jamais ne tente de revenir en arrière.
Jacques Renaud
Coureur cycliste professionnel français
À peine mon carnet refermé, je décide de me promener sur les berges du Mékong. Au bout de vingt minutes, une pause s’impose. La chaleur semble pire à supporter ici qu'en Thaïlande. Pourtant, le thermomètre affiche les mêmes températures… Je me rends sans détour au restaurant ombragé The Belle Rive Terrace et profite de la vue sur le fleuve. Petit indice de la présence française passée, le déjeuner est composé de spaghettis, accompagnés de légumes de la région. Un smoothie aux fruits frais constitue le dessert et nous voilà parties pour les cascades Tad Sae.

Malgré le mauvais état des routes, K. conduit bien le scooter loué pour l'occasion. Trous, graviers et pistes non bitumées semblent la norme au Laos... C'est l'occasion de traverser plusieurs villages et de remarquer l'hétérogénéité des habitations. Chaque famille a l’air d’aspirer à posséder sa maison et la construit petit à petit selon ses moyens. Ainsi, de solides maisons en brique jouxtent de petites cabanes en bois, alors que quelques villas luxueuses trônent au milieu de vastes propriétés et que quelques tentes de fortune suggèrent le dénuement de leurs occupants.
État de la route depuis Luang Prabang vers En

État de la route depuis Luang Prabang vers En
Après vingt-cinq minutes de trajet, nous arrivons à En et rions quelques minutes avec de jeunes enfants qui s'approchent de nous. L'une des petites filles est très fière de nous montrer ses ongles, vernis de bleu ! Sa mère nous apprend que les cascades sont presque asséchées en ce moment, faute de pluie. La mousson est en retard cette année, ce qui fait craindre une mauvaise récolte. Un coup dur dans un pays où 70% des habitants possèdent un emploi lié à l'agriculture.

Le passeur attitré (ou pas) est prêt, lui, à nous vendre un ticket pour aller voir la cascade. Heureusement que nous avons échangé avec les villageois juste avant ! Nous préférons rebrousser chemin, direction le marché de nuit de Luang Prabang. Celui-ci, bien que touristique, propose de plus jolis souvenirs qu'en Thaïlande (avis tout à fait subjectif). Certaines écharpes et tissus en tous genres, très jolis, semblent faits main. Le musée national qui se détache sur le ciel coloré en arrière-plan contribue grandement à la beauté du cadre.
Vue sur le musée national depuis le marché de nuit

Vue sur le musée national depuis le marché de nuit
Nous avons du temps à tuer avant le dîner, excuse parfaite pour s’essayer à un massage lao traditionnel. Ayant appris les rudiments du massage thaï à Chiang Mai, il me semble que les mouvements réalisés lors de ce dernier sont plus complexes et ne reposent pas autant sur des pressions effectuées avec les pouces - pressions que j’ai bien ressenties, merci !

Pour dîner, notre choix se porte sur un hot pot végétarien. Je suis aussi perdue devant l'appareil et les assiettes pleines d'ingrédients que lors de mon premier barbecue coréen... La serveuse nous aide à le démarrer et nous nous régalons bientôt de nouilles, tofu et légumes verts. Un passage rapide par la piscine de l'hôtel pour me rafraîchir conclut cette journée alors que je règle le réveil pour cinq heures du matin - objectif : voir le lever du soleil sur le Mékong.

Barbecue laotien avec usage traditionnel du charbon de bois

Barbecue laotien avec usage traditionnel du charbon de bois
Mon hôtel est stratégiquement situé à côté du mont Phousi, depuis lequel on peut voir toute la ville et dont l'ascension ne prend qu'une quinzaine de minutes. La fine pluie qui tombe ne me décourage pas et j'atteins bientôt le sommet, après avoir croisé quelques moines appartenant au monastère voisin. Malheureusement, la pluie s'intensifie et j'assiste plutôt au lever d'un jour au ciel gris et chargé. Par ailleurs, la ville apparaît plus étendue que je n'en avais eu l'impression en arrivant.

Après quelques instants, je redescends par l'autre flanc de la colline pour rejoindre le centre-ville, mais surprise : les escaliers sont fermés au niveau du guichet d'entrée. Je coince l'argent correspondant à mon ticket d'accès entre les battants d'une fenêtre et me lance dans une séance d'escalade et de contorsions dans le terrain forestier entourant la grille. Si je suis si déterminée à ne pas rebrousser chemin (outre les escaliers à remonter), c'est que la cérémonie de l'aumône ou Tak Bat est sur le point de commencer.


Celui qui donne avec un cœur pur, sans attente, accumule un grand mérite.
Siddhartha Gautama
Maître spirituel, fondateur du bouddhisme
Les moines bouddhistes de Luang Prabang, reconnaissables à leur robe safran et leurs pieds nus, déambulent tous les matins pour recevoir les offrandes qui les nourrissent. Le surplus, re-distribué en chemin, bénéficie aux plus défavorisés. Ce rituel se voit régulièrement perturbé par des touristes peu respectueux des consignes, pourtant affichées partout : ne pas être vêtu légèrement (surtout les femmes), être silencieux, rester à distance des moines… Il est également conseillé de s'éloigner du temple Wat May autour duquel se massent la plupart des spectateurs, même s’il s’agit du plus sûr moyen de ne pas louper la scène.

À cause de la séance d'escalade imprévue, j'arrive au moment où une colonne de moines s'éloignent au loin… Une promenade dans le marché du matin (en pleine installation) plus tard, j’hésite à me lever de nouveau très tôt demain matin, lorsque j'aperçois un nouveau groupe de moines en file indienne, se dirigeant vers les habitants installés sur de petits tabourets en plastique le long du trottoir, et attendant de faire l'aumône. Quelle vue inédite !

Colonne de moines lors de la cérémonie du Tak Bat

Colonne de moines lors de la cérémonie du Tak Bat
J'observe la mécanique bien rodée des offrandes un instant, avant de retourner au marché. Des vendeuses assises sur des bâches à même le sol proposent des produits alimentaires : légumes verts, sacs de riz, poissons et carcasses d'animaux, sur lesquels se posent déjà des mouches… L'ensemble renvoie une impression de précarité que je n'avais ressentie que de manière abstraite jusque-là, en particulier les deux enfants, maigres et sales, au regard perçant, qui essaient de vendre quelques feuilles de salade…

De retour à l'hôtel, je médite sur les événements de la matinée. Après quoi, je me rends à l'ancien palais royal, visiblement fermé lorsque j'arrive aux grilles. Je me rabat sur le musée d'ethnologie, une superbe découverte : petit mais très documenté, il donne un aperçu des différentes ethnies qui composent le Laos. En effet, les (Tai) Lao ne représentent que 53% de la population et il existe (encore) dans le pays une multitude de peuples d'origine austroasiatique, hmong-yao, tai-kadai ou sino-tibétaine, avec leur langue et leurs traditions.

Habits traditionnels Akha, une minorité sino-tibétaine

Habits traditionnels Akha, une minorité sino-tibétaine
Ils ont été classés récemment en trois catégories basées sur l'altitude de leur lieu d'habitation traditionnel - le Laos étant un pays de montagnes. Il y a les habitants des plaines (Lao Loum), des pentes de montagne (Lao Theung) et des sommets (Lao Soung). Cette classification évolue constamment, notamment à cause de la migration de nombreux habitants vers les plaines et les villes pour faciliter les échanges commerciaux et l'accès à l'éducation. Un exemple parmi les mille détails fascinants que révèle ce musée.

K. me rejoint ensuite pour une heure de scooter jusqu’aux cascades de Kuang Si. Nous devons nous garer un peu avant d'arriver, puis une voiturette nous conduit au complexe touristique, moyennant un droit d'entrée. Nous dépassons les stands de souvenirs et atteignons un refuge d'ours noirs, braconnés pour leur bile réputée aphrodisiaque… L'un d'entre eux est en tous cas allongé dans son hamac comme un pacha ! Puis, les cascades apparaissent, une version miniature du parc d'Erawan visité en Thaïlande quelques semaines plus tôt. Nous sommes bientôt récompensées de nos efforts pour monter tout en haut du parc par de l'eau turquoise froide, et un endroit peu fréquenté. Parfait pour une baignade revigorante.

Balançoire en haut des cascades de Kuang Si

Balançoire en haut des cascades de Kuang Si
Affamées, nous dégustons une pizza étonnamment authentique sur le chemin du retour, avec vue dégagée sur le Mékong. Je suis contente de retrouver (enfin) mon lit pour récupérer avant le trajet de demain vers Nong Khiaw… et j’ai été bien inspirée ! Après une aventure éprouvante dans la jungle, le retour vers Luang Prabang me semble d'une facilité déconcertante. L'arrivée en début d'après-midi me laisse le temps d'écrire et de m’occuper de l’intendance - réservation de billets, passage à la pharmacie, retrait d'argent.

Le dernier jour sur place débute par un brunch à l'Indigo Café, judicieusement dégusté au moment où la grosse averse de la journée s'abat sur la ville. Je me dirige ensuite vers le musée national, que j'avais essayé de visiter quelques jours plus tôt. Il est ouvert cette fois. Le bâtiment est petit et d'un style étonnant, mélangeant architecture coloniale et motifs asiatiques. Construit au début du XXe siècle sous le règne du roi Sisavang Vong (et le protectorat français), il a été le lieu de résidence de la famille royale jusqu'à son renversement par le parti communiste en 1975.


Si j'ai la chance de retourner au Laos, la première chose que j'apporterai sera la liberté.
Prince Soulivong Savang
Homme politique laotien
On peut y voir l'ancienne salle du trône, des reconstitutions de pièces de vie de l'époque et une collection d'objets ayant appartenu aux derniers membres de la monarchie laotienne. Le parc autour du palais abrite notamment le Wat Ho Pha Bang, temple renfermant le Phra Bang, statue bouddhiste la plus vénérée du pays et qui a donné son nom à Luang Prabang - littéralement le Bouddha d’Or. On peut également y trouver une salle de spectacles où des représentations de théâtre traditionnel sont données régulièrement.

La visite de l'ensemble me prend une bonne heure, après quoi je m'installe à une table du Joma Bakery Café pour me lancer dans un atelier de cartes postales. Une fois prêtes, je me rends au bureau de poste juste à côté pour les envoyer et rien de plus facile - tout y est encore écrit en français. La communication avec l'employée au guichet, comme partout, se fait néanmoins en anglais.

Retour vers le passé à l’intérieur du bureau de poste

Retour vers le passé à l’intérieur du bureau de poste

Après une pause à l'hôtel, il est l'heure de dîner : le Yuni Yupoun propose des assiettes de dégustation de mets végétariens laotiens - parfait ! Un massage traditionnel achève de faire partir mes courbatures et m'aide à trouver le sommeil rapidement. Je prends le train le lendemain matin pour le nord du pays, où le Mékong ne passe pas. Or, il me reste une activité à réaliser dont la pluie m'a privée la dernière fois : voir le soleil se lever sur la mer des rivières. Le réveil sonne donc pour la troisième fois en une semaine à cinq heures du matin et quelques instants plus tard, mission accomplie !

Lever de soleil sur le Mékong à cinq heures du matin

Lever de soleil sur le Mékong à cinq heures du matin

Quitte à être debout, j'observe à nouveau la cérémonie du Tak Bat devant le Wat May, où les prêtres sont bien plus nombreux à défiler que la fois précédente. Un petit tour au marché du matin et je grappille deux heures de sommeil supplémentaires avant de remballer mes affaires et de héler un taxi, direction Oudomxay. J'ai beaucoup aimé Luang Prabang et sa douceur de vivre, et ne peux que recommander cette destination à tous les voyageurs en quête de tranquillité.

Et toi, cher voyageur, chère voyageuse, as-tu eu l’occasion de vivre quelques jours au rythme des offrandes, des divers marchés et des sublimes couchers de soleil sur le Mékong?

P.S. n'hésite pas à faire un tour sur mon compte Instagram pour des photos exclusives de la destination du jour et un aperçu de mes autres voyages !



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